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Nous passâmes auprès du tombeau d'un enfant, qui servait de limites à deux nations. On l'avait placé au
bord du chemin, selon l'usage, afin que les jeunes femmes, en allant à la fontaine, pussent attirer dans leur
sein l'âme de l'innocente créature et la rendre à la patrie. On y voyait dans ce moment des épouses nouvelles
qui, désirant les douceurs de la maternité, cherchaient, en entrouvrant leurs lèvres, à recueillir l'âme du petit
enfant, qu'elles croyaient voir errer sur les fleurs. La véritable mère vint ensuite déposer une gerbe de maïs et
des fleurs de lis blanc sur le tombeau. Elle arrosa la terre de son lait, s'assit sur le gazon humide et parla à son
enfant d'une voix attendrie :
" Pourquoi te pleuré-je dans ton berceau de terre, ô mon nouveau-né ! Quand le petit oiseau devient
grand, il faut qu'il cherche sa nourriture, et il trouve dans le désert bien des graines amères. Du moins tu as
ignoré les pleurs ; du moins ton coeur n'a point été exposé au souffle dévorant des hommes. Le bouton qui
sèche dans son enveloppe passe avec tous ses parfums, comme toi, ô mon fils ! avec toute ton innocence.
Heureux ceux qui meurent au berceau ; ils n'ont connu que les baisers et les souris d'une mère ! "
Déjà subjugués par notre propre coeur, nous fûmes accablés par ces images d'amour et de maternité, qui
semblaient nous poursuivre dans ces solitudes enchantées. J'emportai Atala dans mes bras au fond de la foret,
et je lui dis des choses qu'aujourd'hui je chercherais en vain sur mes lèvres. Le vent du midi, mon cher fils,
perd sa chaleur en passant sur des montagnes de glace. Les souvenirs de l'amour dans le coeur d'un vieillard
sont comme les feux du jour réfléchis par l'orbe paisible de la lune, lorsque le soleil est couché et que le
silence plane sur la hutte des sauvages.
Qui pouvait sauver Atala ? qui pouvait l'empêcher de succomber à la nature ? Rien qu'un miracle, sans
doute ; et ce miracle fut fait ! La fille de Simaghan eut recours au Dieu des chrétiens ; elle se précipita sur
la terre, et prononça une fervente oraison, adressée à sa mère et à la Reine des vierges. C'est de ce moment, ô
René ! que j'ai conçu une merveilleuse idée de cette religion qui dans les forêts au milieu de toutes les
privations de la vie, peut remplir de mille dons les infortunés ; de cette religion qui, opposant sa puissance au
torrent des passions, suffit seule pour les vaincre, lorsque tout les favorise, et le secret des bois, et l'absence
des hommes, et la fidélité des ombres. Ah ! qu'elle me parut divine, la simple sauvage, l'ignorante Atala, qui
à genoux devant un vieux pin tombé, comme au pied d'un autel, offrait à son Dieu des veux pour un amant
idolâtre ! Ses yeux levés vers l'astre de la nuit, ses joues brillantes des pleurs de la religion et de l'amour,
étaient d'une beauté immortelle. Plusieurs fois il me sembla qu'elle allait prendre son vol vers les cieux ;
plusieurs fois je crus voir descendre sur les rayons de la lune et entendre dans les branches des arbres ces
Génies que le Dieu des chrétiens envoie aux ermites des rochers, lorsqu'il se dispose à les rappeler à lui. J'en
Les chasseurs 21
Atala
fus affligé, car je craignis qu'Atala n'eût que peu de temps à passer sur la terre.
Cependant elle versa tant de larmes, elle se montra si malheureuse, que j'allais peut-être consentir à
m'éloigner, lorsque le cri de mort retentit dans la forêt. Quatre hommes armés se précipitent sur moi : nous
avions été découverts ; le chef de guerre avait donné l'ordre de nous poursuivre.
Atala, qui ressemblait à une reine pour l'orgueil de la démarche, dédaigna de parler à ces guerriers. Elle
leur lança un regard superbe, et se rendit auprès de Simaghan.
Elle ne put rien obtenir. On redoubla mes gardes, on multiplia mes chaînes, on écarta mon amante. Cinq
nuits s'écoulent, et nous apercevons Apalachucla, situé au bord de la rivière Chata-Uche. Aussitôt on me
couronne de fleurs ; on me peint le visage d'azur et de vermillon ; on m'attache des perles au nez et aux
oreilles et l'on me met à la main un chichikoué [Instrument de musique des sauvages. (N.d.A.)].
Ainsi paré pour le sacrifice, j'entre dans Apalachucla aux cris répétés de la foule. C'en était fait de ma [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ]
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