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reconnaître la situation. Mais, par une malchance déplorable, ils
furent déçus dans leur attente !
223
XVII
DÉNOUEMENT
Une sorte de brouillard s étendait au-dessus et autour de la
dune, et si épais que les premiers rayons ne pourraient le dis-
soudre. On ne se voyait pas à quatre pas, et les branches des
arbres étaient noyées dans ces lourdes vapeurs.
« Décidément, le diable s en mêle ! s écria le brigadier.
Je suis porté à le croire » répondit M. François.
Cependant il y avait lieu d espérer que, dans quelques heu-
res, lorsque le soleil prendrait de la force en gagnant vers le zé-
nith, ces brumes finiraient par se fondre, et la vue pourrait
s étendre largement alors sur le Melrir.
Il n y avait donc qu à patienter et, bien qu il fût plus que
jamais nécessaire d économiser les provisions impossibles à re-
nouveler, il fallut en consommer une partie, et, en réalité, il n en
resta que pour deux jours. Quant à la soif, l eau saumâtre puisée
à la base du tell permit de l apaiser tant bien que mal.
Trois heures s écoulèrent dans ces conditions. Les rumeurs
avaient diminué peu à peu. Une brise assez forte s élevait, qui
faisait cliqueter le branchage des arbres, et, le soleil aidant, il
n était pas douteux que cet épais amas de brumes ne tarderait
plus à se dissiper.
Enfin, les volutes commencèrent à s éclaircir autour du tell.
Les arbres montrèrent le squelette de leur ramure, et squelette
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est le mot juste, car il n y avait là que des arbres morts, sans un
fruit, sans une feuille. Puis, le brouillard fut définitivement en-
levé par un coup de vent qui le chassa vers l ouest.
Et alors le Melrir se découvrit sur une vaste étendue.
Sa surface, par suite de l abaissement du fond de cette ho-
fra, était en partie inondée, et une ceinture liquide, large d une
cinquantaine de mètres, entourait le tell. Au-delà, sur les ni-
veaux plus élevés, reparaissaient les nappes efflorescentes. Puis,
dans les bassures, l eau réverbérait les rayons solaires entre de
longues plaines sablonneuses que leur côte maintenait au sec.
Le capitaine Hardigan et l ingénieur avaient dirigé leurs re-
gards vers tous les points de l horizon. Puis, M. de Schaller dit :
« Ce n est pas douteux, il s est produit quelque phénomène
sismique considérable& Les fonds du chott se sont abaissés et
les couches liquides du sous-sol l ont envahi&
Eh bien, avant que le cheminement soit devenu imprati-
cable partout, répondit le capitaine, il faut partir& et à
l instant ! »
Tous allaient descendre, lorsqu ils furent cloués à leur
place par le spectacle terrifiant qui s offrit à leurs yeux.
À une demi-lieue vers le nord apparaissait une bande
d animaux qui fuyaient à toute vitesse, venant du nord-est ; une
centaine de fauves et de ruminants, lions, gazelles, antilopes,
mouflons, buffles, se sauvant vers l ouest du Melrir. Et il fallait
qu ils fussent réunis dans une commune épouvante qui annihi-
lait la férocité des uns et la timidité des autres, ne songeant,
dans cet affolement extraordinaire, qu à se soustraire au danger
que provoquait cette déroute générale des quadrupèdes du Dje-
rid.
225
« Mais que se passe-t-il donc là-bas ? répétait le brigadier
Pistache.
Oui& Qu y a-t-il ? » demandait le capitaine Hardigan.
Et l ingénieur auquel s adressait cette question la laissait
sans réponse.
Et alors un des spahis de s écrier :
« Est-ce que ces bêtes vont se diriger vers nous ?
Et comment fuir ? » ajouta l autre.
En ce moment, la bande n était pas à un kilomètre et se
rapprochait avec la rapidité d un express. Mais il ne sembla pas
que ces animaux, dans leur fuite éperdue, eussent aperçu les six
hommes qui s étaient réfugiés sur le tell. En effet, dans un
même mouvement, ils obliquèrent vers la, gauche et finirent par
disparaître au milieu d un tourbillon de poussière.
Du reste, sur l ordre du capitaine Hardigan, ses compa-
gnons s étaient couchés au pied des arbres afin de n être point
découverts. C est alors qu ils virent passer au loin des bandes de
flamants qui détalaient aussi, tandis que des milliers d oiseaux
fuyaient à grands coups d aile vers les rives du Melrir.
« Mais qu y a-t-il donc ?& » ne cessait de répéter le briga-
dier Pistache.
Il était quatre heures de l après-midi et la cause de cet
étrange exode ne tarda pas à se révéler.
Du côté de l est, une nappe liquide commençait à s étendre
à la surface du chott et la plaine sablonneuse fut bientôt inondée
226
tout entière, mais seulement sous une mince couche d eau. Les
efflorescences salines avaient peu à peu disparu jusqu à l ex-
trême portée du regard et c était un immense lac qui réverbérait
alors les rayons du soleil.
« Est-ce que les eaux du golfe auraient envahi le Melrir ?&
dit le capitaine Hardigan.
Je ne le mets plus en doute, répondit l ingénieur. Ces
rumeurs souterraines que nous avons entendues provenaient
d un tremblement de terre& Des perturbations considérables se
sont produites dans le sol. Il en est résulté un abaissement des
fonds du Melrir et peut-être de toute cette partie est du Djerid&
La mer, après avoir rompu ce qui restait du seuil de Gabès,
l aura inondé jusqu au Melrir ! »
Cette explication devait être exacte. On se trouvait en pré-
sence d un phénomène sismique dont l importance échappait
encore. Et, par l effet de ces perturbations, il était possible que
la mer Saharienne se fût faite d elle-même et plus vaste que le
capitaine Roudaire ne l avait rêvée& [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ]
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reconnaître la situation. Mais, par une malchance déplorable, ils
furent déçus dans leur attente !
223
XVII
DÉNOUEMENT
Une sorte de brouillard s étendait au-dessus et autour de la
dune, et si épais que les premiers rayons ne pourraient le dis-
soudre. On ne se voyait pas à quatre pas, et les branches des
arbres étaient noyées dans ces lourdes vapeurs.
« Décidément, le diable s en mêle ! s écria le brigadier.
Je suis porté à le croire » répondit M. François.
Cependant il y avait lieu d espérer que, dans quelques heu-
res, lorsque le soleil prendrait de la force en gagnant vers le zé-
nith, ces brumes finiraient par se fondre, et la vue pourrait
s étendre largement alors sur le Melrir.
Il n y avait donc qu à patienter et, bien qu il fût plus que
jamais nécessaire d économiser les provisions impossibles à re-
nouveler, il fallut en consommer une partie, et, en réalité, il n en
resta que pour deux jours. Quant à la soif, l eau saumâtre puisée
à la base du tell permit de l apaiser tant bien que mal.
Trois heures s écoulèrent dans ces conditions. Les rumeurs
avaient diminué peu à peu. Une brise assez forte s élevait, qui
faisait cliqueter le branchage des arbres, et, le soleil aidant, il
n était pas douteux que cet épais amas de brumes ne tarderait
plus à se dissiper.
Enfin, les volutes commencèrent à s éclaircir autour du tell.
Les arbres montrèrent le squelette de leur ramure, et squelette
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est le mot juste, car il n y avait là que des arbres morts, sans un
fruit, sans une feuille. Puis, le brouillard fut définitivement en-
levé par un coup de vent qui le chassa vers l ouest.
Et alors le Melrir se découvrit sur une vaste étendue.
Sa surface, par suite de l abaissement du fond de cette ho-
fra, était en partie inondée, et une ceinture liquide, large d une
cinquantaine de mètres, entourait le tell. Au-delà, sur les ni-
veaux plus élevés, reparaissaient les nappes efflorescentes. Puis,
dans les bassures, l eau réverbérait les rayons solaires entre de
longues plaines sablonneuses que leur côte maintenait au sec.
Le capitaine Hardigan et l ingénieur avaient dirigé leurs re-
gards vers tous les points de l horizon. Puis, M. de Schaller dit :
« Ce n est pas douteux, il s est produit quelque phénomène
sismique considérable& Les fonds du chott se sont abaissés et
les couches liquides du sous-sol l ont envahi&
Eh bien, avant que le cheminement soit devenu imprati-
cable partout, répondit le capitaine, il faut partir& et à
l instant ! »
Tous allaient descendre, lorsqu ils furent cloués à leur
place par le spectacle terrifiant qui s offrit à leurs yeux.
À une demi-lieue vers le nord apparaissait une bande
d animaux qui fuyaient à toute vitesse, venant du nord-est ; une
centaine de fauves et de ruminants, lions, gazelles, antilopes,
mouflons, buffles, se sauvant vers l ouest du Melrir. Et il fallait
qu ils fussent réunis dans une commune épouvante qui annihi-
lait la férocité des uns et la timidité des autres, ne songeant,
dans cet affolement extraordinaire, qu à se soustraire au danger
que provoquait cette déroute générale des quadrupèdes du Dje-
rid.
225
« Mais que se passe-t-il donc là-bas ? répétait le brigadier
Pistache.
Oui& Qu y a-t-il ? » demandait le capitaine Hardigan.
Et l ingénieur auquel s adressait cette question la laissait
sans réponse.
Et alors un des spahis de s écrier :
« Est-ce que ces bêtes vont se diriger vers nous ?
Et comment fuir ? » ajouta l autre.
En ce moment, la bande n était pas à un kilomètre et se
rapprochait avec la rapidité d un express. Mais il ne sembla pas
que ces animaux, dans leur fuite éperdue, eussent aperçu les six
hommes qui s étaient réfugiés sur le tell. En effet, dans un
même mouvement, ils obliquèrent vers la, gauche et finirent par
disparaître au milieu d un tourbillon de poussière.
Du reste, sur l ordre du capitaine Hardigan, ses compa-
gnons s étaient couchés au pied des arbres afin de n être point
découverts. C est alors qu ils virent passer au loin des bandes de
flamants qui détalaient aussi, tandis que des milliers d oiseaux
fuyaient à grands coups d aile vers les rives du Melrir.
« Mais qu y a-t-il donc ?& » ne cessait de répéter le briga-
dier Pistache.
Il était quatre heures de l après-midi et la cause de cet
étrange exode ne tarda pas à se révéler.
Du côté de l est, une nappe liquide commençait à s étendre
à la surface du chott et la plaine sablonneuse fut bientôt inondée
226
tout entière, mais seulement sous une mince couche d eau. Les
efflorescences salines avaient peu à peu disparu jusqu à l ex-
trême portée du regard et c était un immense lac qui réverbérait
alors les rayons du soleil.
« Est-ce que les eaux du golfe auraient envahi le Melrir ?&
dit le capitaine Hardigan.
Je ne le mets plus en doute, répondit l ingénieur. Ces
rumeurs souterraines que nous avons entendues provenaient
d un tremblement de terre& Des perturbations considérables se
sont produites dans le sol. Il en est résulté un abaissement des
fonds du Melrir et peut-être de toute cette partie est du Djerid&
La mer, après avoir rompu ce qui restait du seuil de Gabès,
l aura inondé jusqu au Melrir ! »
Cette explication devait être exacte. On se trouvait en pré-
sence d un phénomène sismique dont l importance échappait
encore. Et, par l effet de ces perturbations, il était possible que
la mer Saharienne se fût faite d elle-même et plus vaste que le
capitaine Roudaire ne l avait rêvée& [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ]